Journal de Louve #61 Réflexion
Non jamais, je ne cesse ma réflexion et si je la veux pour amie, je dois lui laisser la place qui lui revient. Je passe des étendues d’heures dans le nid bien à l’abris derrière mon front à laisser aller cascade ce qui doit se penser.
Je le sais, j’ai les cheveux Louve et cette vie qui m’habite. Je ne l’avale jamais tout à fait assez grand.
Cette vie n’est pas pour moi, celle où je ne peux rien dire, où j’ai la camisole à la bouche. Je bascule entre les cris d’une furie et le silence des profondeurs de l’eau où plus personne ne vit. Je ne comprends pas toujours dans mes journées où la tolérance n’est pas tout tolérer. Où la bienveillance s’infiltre amèrement dans le fait de regarder avec amour les conduites méchantes et monstrueuses parce qu’elles existent et parce qu’elles me fascinent.
Il ne faut pas de tout pour faire un monde. J’ouvre pourtant de grands yeux passionnés par le noir de la suie écrasée et agglutinée sur le pelage de ceux qui courent à côté de moi, et sous mes propres ongles. A la fois ça m’apaise de connaître la complétude et à la fois cela représente un défi.
Je ne sais dire que les imageries. Cela fait-t-il de ma vie une vapeur répandue et peuplée de chimères ? Je vis avec mon petit chat, mort depuis un an à la saison prochaine, avec mes pensées de tous les temps à conjuguer mêmes si elles ne sont pas d’accord. Je concilie mes manières d’être moi dans le je qui emploie ses membres pour faire ce qui lui tient à cœur, concilie dans le jeu ce qu’il reste à aimer.
Quel est donc ce mirage ?
Je cherche en ma mémoire. Puisque j’ai accepté d’épouser ce visage qui sait dire les mêlées et les nuées volatiles qui me font m’envoler ou bien rester à terre. Ai-je le droit d’avoir déraciné le drame en énonçant parfois qu’il ne me convient plus ? Ai-je encore en suivant le fil ténu des réflexions d’autres choses à changer ?
J’ai toujours eu peur de partir sans bagages au risque que mon âme s’égare, je pense toujours ça vrai. Je vois bien que je me crois plus perdue que je ne suis à toutes les époques. Et si cette fois peut-être, l’été du corbeau s’ouvrait sur autre chose. Une quête plutôt qu’une échappée, concentrer de nouveau mes élans sur une vie ménéstrelle. Qu’importe ce qu’ils disent, je saurai faire le tri avec une épuisette avant de crier jusqu’à m’en étouffer ou d’atteindre le silence en ayant bu la tasse. J’ai compris que si je veux rester ce que je suis, je dois chérir ces mouvements de pensée pour m’ajuster au plus près des phases de la lune.