Journal de Louve #28 Renard Rivage
Il étend sa serviette, tout près de la baignoire.
S’allonge sur le doux bleu. S’étire. Sa bouche me dit des sourires et ses doigts se baladent où ils en ont envie.
Je m’allonge, paisible au ventre, lisse son pelage de ma main.
L’air est humide, sa peau est tiède. Ma tête est sous sa tête, je sais qu’il me regarde
quand il raconte
ça fait des ondes.
Ses récits vont et viennent, ou ne reviennent même pas.
C’est un Renard Rivage.
Un être où je viens déferler avec une délicate tendresse.
Il ne m’appartient pas. Il nous appartient le désir qui nous lie.
Je parle quand je veux rendre compte de la couleur qu’a la vie quand elle traverse mes yeux, quand elle traverse mes pores.
Ses oreilles dressées capturent mes mots, mes souffles et mes mouvements.
Je ponctue ma balade verbale de baisers. Le parsème en entier.
Et cela prend le rythme de mes phrases-pensées.
Nous habitons ce monde et tu es ma maison. Danse mon amour, et danse avant même, qu’il ne reste que ça.
C’est un Renard Rivage. Celui que j’apprivoise depuis qu’il m’y a invitée avec une sage patience.
Quand il visite mon corps, il fait chaud dans la pièce.
C’est une histoire de crocs qui s’alignent et de cœurs qui s’agitent. De membres qui s’apprennent. C’est une histoire à nous.
Nous donnons en même temps, et puis les heures nous suivent.
Quand nous nous réveillons, nous faisons du café. Je le brosse un moment. Il me parle renard et je lui répond louve.
Je range ma chemise dans mon sac et mes clés dans ma veste. Avant le départ je regarde le sol, les empreintes de nos pas sont fraiches, elles se rejoignent, son odeur restera posée sur mon foulard jusqu’à la prochaine fois.
Je te dis bonne journée, creuse tes sentiers en fleurs et profite du printemps. Attendre de se revoir c’est déjà une fête.
Il y a toujours un baiser latent dans nos silences, un apaisement dans les bruits qui surviennent de la rue.
Je ferme la porte, j’entends encore dans ma tête trotter son petit pas, qui visite le monde à sa manière, qui teinte le mien de la complexité joyeuse qu’il renfermait jusqu’à lors dans un coffre aux trésors et qu’il me propose désormais, chaque fois, de partager.