Journal de Louve 2023

Journal de Louve #20 S’il me faut parler seule

J’ai abandonné le journal quelques temps. Je voulais voyager.

Je pensais que c’était clos pour toujours.

J’ai dit que c’était terminé, que j’avais fait le tour. Je voulais trouver autre chose, parler à l’altérité. Mais ça, je le fais quand je chante le soir dans les karaokés, quand je mets en scène.

Il me faut parler seule.

Il me semblait que c’était tourner en rond en moi que de continuer un journal. J’exigeais la rencontre et l’interaction. Je n’ai trouvé en une saison qu’une poignée de silence.

Il me faut parler seule et à l’autre en même temps. Je n’avais pas besoin d’une forme nouvelle. Il s’agissait seulement de continuer la même quête en me glissant où j’avais envie d’être. Louvoyer, serpenter, épouser le virage.

Tout comme j’ai le même corps, je ne peux en appeler un que je ne connais pas. Mais je choisis du mien ce que je veux découvrir.

Le journal sait tant faire, il est le miroir qui pense, qui adopte des alouettes et celui qui réfléchit.

Il me faut dire par la grande porte, par les mots qui sortent des pages, ceux qui se distinguent des griffonnés maintenus sous les couvertures de ma chambre.

Je voulais voyager, j’ai des mots qui voyagent.

Il m’habillent et me remplissent quand ils sortent de moi. Ils provoquent des échos, je le sais, mais sur invitation. Ils me semblent courtois pourtant savent être libres. Ils provoquent tour à tour le vacarme, la consolation et l’accalmie. Je les connais. Je sais qu’ils durent et je sens ce qu’ils font.

Ils tiennent compagnie.

L’envie de retrouver le journal me saisit par le bras. Je me sens faire partie du rythme commun. Demain c’est le printemps.

Claudia Schmalz

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