Journal de Louve 2025

Journal de Louve #81 Rejeter l’écume

Tous les deux, on s’est volés, l’été.

L’écume était à portée de doigts. Tu m’as saisie avant elle, contre le rebord.

Et j’ai attendu.

La mélancolie aux ongles, je crache la marée. Elle est rouge comme les tempes qui cognent avec afflux.

Je nourris pour l’été un trouble, un dédain. Et une mélodie sourde qui me berce autant qu’elle hante mes instincts.

J’ai l’air bête sur ce pallier, à te dire que je t’aime. Je parle à la fois futur et passé, toi, tu ne m’aidera pas.

Nous aurions mieux fait
De ramasser l’écume
A la petite cuillère.

Maintenant je crains de n’être qu’abandonnée, mais de des petits morceaux de chair déposées sur les vagues,
baignant en rythme lent,
et qui flottent.

Je rêve
que tu viennes me chercher

Mais tant que je maudis l’été,
La peau collante à l’odeur de monoï et les autres hommes qui le font remarquer

J’ai besoin de m’enfouir, au fond d’un ventricule.
J’ai le mal de mère, comme je n’en ai pas eue. J’ai dû apprendre à nager au milieu des requins.

J’en ai fait mes amis, pour certains. Mais je n’ai jamais compris comment parler leur langue.

Je brasse en espérant
la fin de la marée. Le début de l’automne viendra me consoler.

Je m’efface en attendant, on ne me voit bientôt plus.

Et je cherche
dans ma bouche malgré l’odeur de sel
une empreinte de ta voix

Je parle à la fois
futur et passé.

Tous les deux on s’est volés, l’été. J’ai rejeté l’écume,
même à portée de doigts,
Je la juge toujours sans aucune cohérence.
Toi, tu ne le verra pas.

Si tu viens demain,
ramasser les pelures de ma chair, éparpillées,
portées par la marée
dis-moi très bas qu’elles ont
l’odeur de monoï.

Saisis-moi contre un bord,
et tu n’attendras pas.

Photographie de David Gomez sur Pexels

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